La professionnalisation de la formation métier d’agent de sécurité au Luxembourg est une revendication de longue date des syndicats. Qui aimeraient la même rigueur que celle qui est de mise en Belgique, en France ou en Allemagne.
En Belgique, en France et en Allemagne, agent de sécurité est un métier reconnu à part entière et ne peut être exercé qu’après une formation diplômante. Au Luxembourg, l’obligation n’est pas la même puisque s’il est possible de suivre une formation – type M1 –, celle-ci conduit à une simple attestation de formation et non à un diplôme en tant que tel. Ce qui, de longue date, fait grogner les syndicats.
«Il est en effet inconcevable qu’on ne puisse diplômer au Luxembourg et donc reconnaître le métier d’agent de sécurité. D’autant plus qu’un résident luxembourgeois avec une attestation de formation M1 entre les mains ne pourra pas travailler dans un pays voisin», résume Paul Glouchitski, secrétaire syndical au sein du LCGB.
La professionnalisation et une meilleure reconnaissance du métier sont demandées de longue date. Comme le fait que la carte professionnelle de l’agent luxembourgeois soit délivrée par un organisme d’État – en Belgique, c’est par le ministère de l’Intérieur – et non par le seul employeur.
Même avec toutes les formations ou tous les diplômes du monde, nous restons sur de l’humain et des cas isolés ou des cas particuliers peuvent se produire.
Fabian Gillet, directeur, Vigicore
Fabian Gillet, directeur et fondateur de la société de gardiennage Vigicore, active en Belgique et au Luxembourg, apporte un éclairage supplémentaire. «Au Luxembourg, les choses commencent à changer. Un fonds a été mis en place pour financer la formation des agents. En accord avec les syndicats et la Fedil Security Services, un pourcentage de la masse salariale est dédié à l’organisation de formations certifiantes. C’est une volonté commune d’apporter plus de reconnaissance et plus de qualité de service. Mais même avec toutes les formations ou tous les diplômes du monde, nous restons sur de l’humain et des cas isolés ou des cas particuliers peuvent se produire», souligne-t-il.
La plupart des sociétés luxembourgeoises de sécurité, et leurs clients, exigent que les agents soient diplômés et formés. Ce qu’ils doivent faire à l’étranger. C’est une contrainte certaine, mais sur le terrain, la plupart des agents qui travaillent au Luxembourg disposent donc de solides compétences... acquises ailleurs.
«Les agents disposent également d’un agrément du ministère de la Justice. Il faut un casier judiciaire vierge, une enquête d’honorabilité est faite pour chaque agent, et les syndicats et les sociétés imposent systématiquement aux agents de sécurité la formation de type M1. Mais chaque entreprise a sa propre philosophie et ses propres exigences. Chez Vigicore, on impose que tous les agents aient une formation reconnue par le ministère de l’Intérieur belge ou des formations certifiantes françaises en plus du casier judiciaire vierge et d’une enquête d’honorabilité», assure Fabian Gillet.
Des critères supplémentaires sont exigés en cas de travail avec un chien. «En ce qui concerne le maître-chien, en tout cas chez Vigicore, on attache une attention particulière à l’entraînement. On dirige nos agents vers des centres canins où l’on demande un test de sociabilité. Mais également des centres canins où la formation est axée sur la défense et la dissuasion, le tout dans un environnement hostile, c’est-à-dire avec du bruit et des gens avec des gestes parfois équivoques. Il y a des centres canins avec des formations axées sur le mordant et l’attaque. C’est ce que l’on ne veut pas. Le chien est un bon binôme, pour faire de la détection, pour avoir un effet préventif et dissuasif, mais ne doit jamais être utilisé comme une arme. Mais encore une fois, chaque entreprise a sa propre philosophie en la matière», insiste Fabian Gillet.
Un pic d’activité en lien avec le pass sanitaire
Paramètre dont il faut tenir compte: le secteur de la sécurité a été fortement secoué par la crise sanitaire. Les contrats ont d’abord fondu comme neige au soleil pour cause de bureaux vides et de télétravail. Avant que la demande explose à nouveau avec la mise en place du pass sanitaire ou CovidCheck. Résultat: une pression sur la main-d’œuvre et un rajeunissement des effectifs.
Certaines entreprises n’engagent plus qui elles veulent, mais qui elles peuvent.
Fabian Gillet, directeur, Vigicore
«C’est un phénomène connu en Europe, notamment en France et en Belgique: les sociétés de sécurité sont à nouveau submergées de demandes. Il y a un pic d’activité et donc des engagements nécessaires en masse en lien avec le contrôle des pass sanitaires. Certaines entreprises de notre secteur sont peut-être très strictes au moment de l’embauche, comme la nôtre, notamment quant aux critères de formation, au niveau de la maturité et de l’expérience de l’agent. Mais lors de recrutements massifs des grandes sociétés, c’est peut-être moins le cas. Certaines entreprises n’engagent plus qui elles veulent, mais qui elles peuvent», conclut Fabian Gillet.
4.000 emplois dans le secteur
Pour rappel, le secteur de la sécurité et du gardiennage au Luxembourg emploie plus de 4.000 personnes pour un peu moins de 20 sociétés avec un agrément du ministère de la Justice. On estime le nombre à 7,2 agents de sécurité pour 1.000 habitants au Luxembourg, contre 2,6 agents pour 1.000 habitants en France, 1,5 agent pour 1.000 habitants en Belgique et 3 agents pour 1.000 habitants en Allemagne.
Un chiffre à appréhender avec prudence. En y incluant l’activité frontalière, le ratio tombe à 3,5 agents pour 1.000 habitants au Luxembourg. Toujours plus élevé que dans les pays limitrophes, mais cela peut aussi s’expliquer par la présence des institutions européennes, d’un grand nombre de sièges européens d’entreprises ou encore d’une tendance déjà ancienne des entreprises à recourir à des sociétés de gardiennage là ou les entreprises dans d’autres pays employaient leurs agents de sécurité